Je commence un livre d’A.D: « l’audace de vivre ». Ah ! Quel beau titre ! . Il raconte qu’après 13 ans de vrai travail spirituel (groupe Gurdjieff, Inde, ashram, …) son guru lui a dit : « Ce que tu as besoin, c’est de construire une structure intérieure » .. Dur à entendre après cet énorme travail qu’il avait accompli..
J’ai du mal à apprécier - dans le sens mesurer - le chemin que j’ai parcouru.. Parfois, je me dis que je suis à l’arrêt, que rien n’a changé, que c’est trop dur, que c’est trop ambitieux, que cela n’est pas compatible avec une vie normale, que je ne suis pas douée pour emprunter ce chemin.. Je me surprends dans cet état de doute.. je m’y abime.. je m’y noie..
Je suis une peureuse, une peureuse vaillante et courageuse certes, mais une peureuse ! Et ce, depuis toujours ! J’ai peur de ce que je suis et ne suis pas , des situations concrètes et de leurs conséquences.. Et si cette peur était .. Une peur de vivre..
Avec ce « coup de tonnerre dans mon ciel azuré », c’est encore plus net ! Ma vie est suspendue. J’ai peur de projets à long terme.. Serais-je encore là au prochain été ? Au prochain Noël ? Au prochain anniversaire de l’un , de l’autre ? Est-ce que cela vaut la peine de faire cela ou ceci ? « oh! Oui! » me dit la Marielea -de- la -raison .. Mais la Marielea-saboteuse, celle qui croit ne pas mériter, qui croit « pourquoi toi et pas les autres , tu rêves ! » pointe son nez.. Elle n’a pas rendu les armes.
J’ai bien et beaucoup lu, bien et beaucoup assimilé, bien et beaucoup travaillé, bien médité, bien et beaucoup visualisé, bien et beaucoup …. Et pourtant ! J’ai une vague impression qu’il y a une Marielea qui s’accroche à ce malheur pour mieux saboter ma belle vie, mon beau cheminement ! Là, j’ai une « bonne » raison pour ne pas être heureuse, être pessimiste, avoir peur.. Cette Marielea -qui -ne -mérite -pas reprend de la vigueur, elle souffle, elle crache : « Tu n’y penses pas, être sereine ! LoL tu es inconsciente ou quoi ? Tu as une espérance de vie limitée » ou « profite ce sera déjà cela de pris » avec un rire sardonique.. Elle réapparait à la moindre baisse de garde.
Alors j’utilise les outils que j’ai appris : je ne la rejette pas avec fracas (compte tenu que ce que l’on refoule, reviens d’une façon ou d’une autre), je la respecte, je lui dis : « je t’ai vu , coquinette » , je lui susurre: « oui, je t’entends mais que je n’ai pas besoin de toi, je m’assume maintenant, je comprends et te remercie de prendre soin de moi.. » . Elle ricane, elle se moque.. Je me demande si elle a peur de disparaitre si je gagne ! Gurdjieff - et , il n'est pas le seul - disait que le plus dur pour un homme est de quitter sa souffrance.. Et si c’était cela ?
J’ai parfois l’impression que je travaille à vivre ! Que vivre est devenu mon métier ! Que j’ai toujours ces fameuses assiettes de jongleurs qui tournent (pas les mêmes qu’avant..) sur lesquelles je dois veiller afin qu’elles ne tombent pas !
En lisant ce qu‘écrit A.D., je me console .. Je sais le malheur des autres.. Que si A.D. après 13 ans de travail intensif, n’était pas arrivé .. alors moi, avec mes petits travaux en dilettante, sur 3 ans.. C’est normal que je sois encore juste à l’embranchement du chemin..
J’ai du mal à accepter ces retours à la case départ.. Thierry Janssen dit que c’est normal que l’on ne peut pas être en félicité tout le temps.. Ma psychothérapeute me dit que la croissance ,c’est une spirale.. Parfois elle descend.. Que toucher le cœur est douloureux, qu’il faut toucher le fond pour mieux remonter…
Alors, je serre très, très, très fort ,mon bâton de pèlerin.. Et je tente de me construire cette structure intérieure.. Dur , dur ..
*ci-dessus: sculpture de Simone PEIRACHE: la conscience " qui évoque bien pour moi, la naissace de la structure intérieure . J'adore cette artiste !
* "homme-machine " notion utilisée par Gurdjieff sur laquelle je reviendrais