A l'annonce du diagnostic qui me fit basculer dans un autre monde, ce coup de tonnerre dans mon ciel azuré, je
me suis demandé quelles étaient mes chances de survie à 2 ans.. C'était le temps où Sotchi en Russie venait d'être élue pour accueillir les XXII éme Jeux Olympiques d'hiver en 2014.. Je me
figurais déjà que je ne les verrais pas...ni même ceux de Beijing, d'ailleurs ! Le moral n'était pas à son acmé! Deux de mes collègues avaient été emportées par ce tueur silencieux qu'est le
cancer des ovaires en 3 mois , deux ans auparavant... De par mes études, je savais que ce cancer est un des plus meurtrier.. Espérer survivre 2 ans était déja bien. Nos amis chirurgiens, ma
gynéco et néanmoins amie, mon mari..tous me décrivaient des cas où une de leur patiente avait survécu 7, 5, 10 ans..
Et internet dans cela? Je ne suis pas
allée d'emblée, sur les forum cancer des ovaires ! Trop peur d'y lire des choses que je n'aurais pas pu recevoir.. Curieuse et avide de savoir tout de même, je suis allée chez les
Impatientes, y pomper un peu d'espoir - le désespoir me marquait moins car ce n'était pas la même pathologie, me disais-je
..
Puis petit à petit, je
fus prête à affronter mon destin : je suis allée sur une " fil'ovaire", un forum de femmes atteintes de ce cancer. Du point de vue connaissances médicales, je n'y ai que peu appris. J'ai
une formation médicale, et le complément peut m'être apporté par mon mari. Mais j'y ai puisé des tonnes et des tonnes de courage, d'optimisme, d'encouragement, d'opiniâtreté. J'ai pu
avoir une longueur d'avance grâce à l'expérience de formidables femmes qui combattaient la même chose que moi. Je n'ai jamais participé à ce forum.. Lire qu’une avait survécu X années, me faisait
me croire que je le pouvais aussi ! Je ne faisais que m'y ressourcer -parfois m'attrister, hélas - me réjouir de leurs victoires... Je me faisais petite-souris qui guette, trop apeurée de
faire partie - hélas- du sérail. J'étais encore dans l'observation.. Je lisais beaucoup, beaucoup... des revues médicales d'oncologie, des revues scientifiques, des dernières études ou
découvertes, des livres de "rescapées "du cancer, de thérapeutes, de médecins ayant une pratique oncologique via la psyché..
Et vient DSS ! Là, j'ai eu
envie de participer, de partager ce que j'avais appris, de compléter ce que j'avais compris.. Ce fut les premiers pas sur GUERIR et sur un forum. De belles rencontres et des moins belles aussi!
Les e-calins si dérisoires et si chauds comme de véritables chaudoudous.. Des e-amies dont certaines sont très chères à mon coeur, même après 4 années (elles se reconnaitront
).
GUERIR évoluant d'une façon qui ne me convenait plus, j'ai
décidé de créer "mon forum" des VIctoRIEUSES ( nous étions trois à l'origine mais des divergences de vues (?? ou guerres d'ego ?)
m'ont très vite transformée en cavalier seul ) et surtout, le blog. Je ne prétends pas détenir la vérité, ni être directeur de santé.. Je tiens
juste à ordonner, "fengshuiser" mes trouvailles, mes recherches, les classer et les retrouver facilement. Je n'attendais pas la polémique, ni la contradiction, ni les luttes de
pouvoir. Je ne voulais pas - et ne veux toujours pas - être une Va-t-en guerre-anticancer, ni un porte parole. Je ne souhaitais/e pas non plus affronter le monde entier, ni même le monde
médical.. La critique est toujours très facile, la polémique- accrocheuse, le sujet provocateur aisés à lancer mais je préfère m'appuyer sur ce qui fonctionne bien, le potentialiser, le
développer, plutôt que saccager sans toujours être sûre de ce qu'il adviendra.. Mon attitude- maitresse est le respect des uns et des autres. Je sais que rien n'est parfait, mais avancer ne veut
pas dire détruire.
Je préfère la communication non violente. Je laisse à ceux qui se sente l'âme d'un porte -parole se mettrent en avant, pour le plus grand bien des autres mais surtout le
leurs.
Bien sûr, il y eut des rencontres toxiques, de tristes rencontres qui laminent le
moral.. C'est cela le danger à mon sens, avec la victimisation. Je me sens femme avant d'être - avoir été - cancéreuse, je ne veux pas de cette étiquette collée sur mon front comme une étoile du
mérite. J'ai vécu des moments difficiles - pas tellement sur le plan physique - mais sur le plan moral avec cette si grande
peur de mourir.. Ceux qui sont passés par là savent de quoi je parle. Mais, cette extrême expérience aux confins de la mort ne me donne pas une légion d'honneur, ne m'autorise pas à juger ceux
qui ne comprennent pas, ceux qui fuient, ceux qui lâchement quittent.. Parfois, lorsque je lis la souffrance d'un tel vécu, je me demande: "Et moi, qu'aurais-je fait si j'avais été
de l'autre côté de la barrière ? " Je ne suis ni meilleure, ni pire que la moyenne des humains.. Chacun réagit avec ce qu'il est, ce qu'il a vécu, ce
qu'il ne comprend pas, ce qu'il ne veut pas comprendre ou ne peut pas... Je suis persuadée que si cela nous arrive, c'est que nous avons une expérience à vivre, une leçon de vie à en tirer . J'ai
la chance de ne pas avoir connu de fuite d'amis - ni de mari- pour la simple raison que personne ne sut ce que je vivais (c'était l'été, ce fut facile de masquer ). Il y eut bien des violations
du secret médical qui firent qu'un ami (lui aussi fils de médecin) de Filsenmédecine (alors en terminale) lui demande des nouvelles de sa maman, ou pire, Juliette, amie de Filleenvéto
(alors en première de lycée) qui lui raconte en riant que Charlotte lui a demandé si sa mère était en stade terminal ..Ce à quoi Juliette répondit " oh! je la vois tous les jours
sa maman, elle va très bien."! Ces grandes ou grands bavards des hôpitaux me mettent dans de belle rogne.. Quel intérêt de blablater sur son prochain? (en dehors du fait qu'ils trangressent
l'article 226-13 du Code pénal! mais cela c'est une autre histoire). J'y vois le besoin de se faire peur, de se complaire dans les horreurs pour se rassurer en se disant que pour eux, tout va
bien...
Sur les forums, les tchats, les
sites de malades (1), nous nous trouvons confrontés à des personnes qui vivent les mêmes choses que nous, cela nous confirme que nous ne sommes pas un cas isolé. La Toile devient dépositaire de
tous les maux/mots. Des sociologues qui se sont penchés sur ce phénomène à la demande du Ministère de la Santé, y voient «la construction d'un savoir profane, pratique,
complémentaire du savoir expert des médecins". Cela me plait. Je ne crois pas qu'internet, même si l'on
est un patient-expert, ne remplace le praticien qui lui, s'est formé sur les "bancs de la Faculté " en 12 à 15 ans. Avoir la prétention d'en savoir plus qu'eux me navre et m'effraie en même
temps. Que le patient s'informe, qu'il soit juge de son traitement, qu'il soit acteur de sa maladie , je dis mille fois OUI.
Certains sites sont bien documentés,
prudents, sereins, respectueux et sont d'excellentes sources d'informations complémentaires d'un médecin surchargé. Tout le monde a une histoire où le médecin a fait un diagnostic erroné et d'une
catastrophe évitée grâce à l'information du patient! Selon Denise Silber, consultante de e-santé et
organisatrice de doctors 2.0, le patient devient le premier membre de l'équipe médical: plus il est informé, plus il comprendra son traitement, mieux il
l'appliquera. (Jeune étudiante sage-femme, j'avais été impressionnée par les femmes atteintes de diabéte qui souvent savaient mieux que le corps médical gérer leur diabète,
tellement elles avaient été bien informées par les diabétologues- internet n'existait pas encore !). Rester informé sur sa maladie est crucial pour être sur pied d'égalité avec le médecin
pour discuter des options à prendre vis-à-vis de notre santé.
La difficulté est de faire le tri entre info et intox, d'être sûr de la véracité des informations et des témoignages. Le Conseil de l'Ordre des Médecins encourage les praticiens à prendre les devants et à orienter leurs patients vers des sites de confiance qu'ils auraient adoubbé en quelque sorte. 62% des Français consulteraient le blog de leur médecin si celui-ci en créait un (2) . Je vous invite à lire l'intervention du Docteur Jacques Lucas "Peut-on rendre la « e-santé » acceptable et fiable pour le citoyen ?".
La plupart des forum et sites de santé ou de patients se relaient sur Facebook. carenity inspiré du patientslikeme.com américain est le premier réseau social de malades et de leurs proches. Le
site est en ligne depuis avril 2011. Carenity est édité par Else Care, société entièrement indépendante de l'industrie de la santé et contrôlée par son fondateur. Les plus accrocs au net ou à la
célébrité y sont déja ;) Et vous ? Je n'y serais pas car cette identité de malade ne me colle plus à la peau...et à vouloir être partout, je crains d'être nulle part. Je me sens glisser vers d'autres horizons cléments .. J'ai depuis quelques années , un autre blog sous ma vraie identité, où je partage mes
passions, mes coup de coeur et de sang... Je crois que je suis de retour chez moi ... et je n'oublie rien et ne regrette rien. Je continuerais à écrire
dans ce blog, des chroniques- santé et à alimenter le forum des Victorieuses avec Alinea et
Betty. Vamos
Merci à la Toile, aussi !
Sources ou compléments d'info: (1) Doctissimo où 8 millions de visiteurs uniques par mois se retrouvent pour discuter d'ongle incarné , de cancer, diabète..(2) enquête Ipsos/Cnom 2010